La médiation dans la fonction publique territoriale

Références

  • Code de justice administrative et notamment les articles L.213-1 et suivants et les articles R. 213-1 et suivants ;
  • Loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire ;
  • Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant statut relatif à la fonction publique territoriale et notamment son article 25-2 ;
  • Décret n° 2022-433 du 25 mars 2022 relatif à la procédure de médiation préalable obligatoire applicable à certains litiges de la fonction publique et à certains litiges sociaux ;

Présentation

Pour moderniser la justice du XXIe siècle et développer des modes alternatifs de règlement des litiges, la médiation est devenue, depuis 2017, un outil qui permet de régler des litiges ou des différends relevant de la compétence du juge administratif.

La loi pour la confiance dans l'institution judiciaire du 22 décembre 2021 et ses textes d'application ont donné un élan inédit à la médiation au sein de la fonction publique territoriale en organisant plusieurs modes de médiation, pour lesquels les centres de gestion ont été confortés dans leur compétence de médiateur :

  • La Médiation Préalable Obligatoire,
  • La médiation à l'initiative des parties,
  • La médiation à l'initiative du juge.

Qu'est-ce qu'une médiation ?

La médiation peut être définie comme : « tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction » (Article L.213-1 du Code de justice administrative).

La médiation suppose nécessairement un dialogue entre les parties et des efforts de compréhension mutuelle de leur part. Les parties vont tenter de parvenir à un accord dans un cadre apaisé et équitable en vue de la résolution amiable de leurs différends avec l'aide d'un tiers, « le médiateur ».

Qui est le médiateur ?

L'organisation de la médiation au sein de la fonction publique territoriale est confiée aux Centres de Gestion.

Au sein de chaque Centre de gestion, le médiateur désigné est qualifié et formé aux techniques de médiation. Il agit dans le cadre de la loi et du respect des personnes.

Il accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence et dans le respect de la charte éthique des médiateurs. Il est tenu au secret et à la discrétion professionnels et intervient en toute confidentialité.

Le médiateur est indépendant vis-à-vis de toute influence extérieure.

Par son rôle de médiateur, il contribue à rétablir la confiance entre l'employeur public territorial et son agent et à faciliter la résolution amiable de leur différend.

Quels sont les avantages de la médiation ?

Dans son rapport final sur l'expérimentation menée entre 2018 et 2021, le Conseil d'Etat souligne 4 points d'intérêt majeurs de la médiation :

  • Pédagogique : la médiation permet d'expliquer les raisons de la décision de l'administration et de mieux la faire comprendre et éventuellement, de la faire accepter. Elle permet également à l'administration de prendre connaissance de certaines lacunes qui lui sont propres (organisationnelles, structurelles, conjoncturelles, etc.) ou qui tiennent à la réglementation en vigueur et d'envisager des mesures correctives ;
  • Social : la médiation offre un espace concret d'écoute et de dialogue et permet de créer ou de recréer des liens et donc de la confiance entre l'administration, l'employeur public et l'agent concerné. L'image de l'administration est également sensiblement améliorée ;
  • Pacificateur : la plupart des médiations aboutissant à un accord (76% en ce qui concerne les MPO), quel qu'il soit (total, partiel, avec ou sans concession de l'administration). Le processus de médiation permet donc aux protagonistes de sortir de la situation de conflit et de blocage dans laquelle ils se trouvaient. Leur relation s'en trouve apaisée et assainie. En phase précontentieuse, la médiation permet de résoudre rapidement, simplement et durablement une situation litigieuse et d'éviter une saisine contentieuse des juridictions administratives ;
  • Novateur : la médiation favorise l'émergence de solutions novatrices, intégrant l'équité en sus de la légalité. En outre, elle permet à l'administration de modifier sa décision sans être désavouée par un juge et sans générer de « jurisprudence » (confidentialité de la médiation).

La médiation est un mode alternatif de règlement des conflits, qui permet de parvenir à renouer un dialogue parfois rompu depuis longtemps et ouvrir la perspective d'une amélioration des relations, d'une nouvelle confiance entre les parties. Tout en offrant des garanties de confidentialité et d'impartialité, la médiation peut aider à résoudre un litige de façon durable grâce à un accord adapté aux besoins de chacun, sans avoir à recourir au juge.

En outre, la médiation permet également une économie de temps et d'argent par rapport à une procédure devant le tribunal. En effet, le coût financier pour la collectivité sera inférieur à une procédure auprès du juge (frais d'avocat, de justice, temps consacré au dossier par les services pendant plusieurs mois...)

Instruction de la demande de médiation

La saisine du médiateur interrompt le délai de recours contentieux et suspend les délais de prescription. Les délais recommencent à courir à compter de la date à laquelle soit l'une des partie ou les deux, soit le médiateur déclarent que la médiation est terminée.

Le médiateur s'assure avant le début de la médiation, que les parties ont pris connaissance et ont accepté les principes d'un processus contradictoire et amiable ainsi que les obligations de confidentialité qui leur incombent.

Les parties sont informées des effets de la médiation et peuvent s'entendre sur la suspension des effets de la décision litigieuse dans l'attente de l'issue de la médiation.

Le médiateur analyse et confronte les arguments des parties. Le médiateur peut entendre les parties ensemble ou séparément.

Les parties peuvent agir seules, se faire représenter ou être assistées par un tiers de leur choix à tous les stades de la médiation.

Dans tous les cas, le principe de la médiation étant le libre consentement des parties, elles peuvent décider à tout moment de mettre fin à la médiation.

L'issue du processus de médiation : 3 solutions possibles

  • Un accord écrit est conclu par les parties. Le médiateur s'assure que l'accord est respectueux des règles d'ordre public. Les parties s'engagent à respecter cet accord. La médiation est terminée. Le juge administratif peut être saisi pour homologuer et donner force exécutoire à cet accord.
  • L'une ou l'autre des parties se désiste ou renonce au processus de médiation. Dans ce cas le délai de recours contentieux de deux mois devant le Tribunal administratif recommence à courir à la date de déclaration de l'une ou l'autre des parties mettant fin à la médiation.
  • La fin d'office de la médiation peut être prononcée par le médiateur s'il constate un rapport de force déséquilibré, une violation des règles pénales ou d'ordre public, des éléments empêchant de garantir l'impartialité et la neutralité du médiateur. A cette date, le délai de recours contentieux recommence à courir.

Le médiateur n'a pas d'obligation de résultat mais garantit le bon déroulement du processus de médiation.

Un procès-verbal de fin de médiation est signé par chacune des parties et par le médiateur.

À défaut de signature, un acte de fin de médiation, ne constituant pas une décision administrative, est établi par le médiateur.

La médiation préalable obligatoire

Après une période d'expérimentation, la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire du 22 décembre 2021 pérennise et généralise la médiation préalable obligatoire (MPO) à la saisine du juge administratif pour certains litiges de la Fonction Publique.

Dans la fonction publique territoriale, la médiation préalable obligatoire est assurée par les centres de gestion de la fonction publique territoriale pour les collectivités territoriales et les établissements publics de leur ressort géographique.

Il s'agit d'une mission obligatoire proposée par les centres de gestion à laquelle les employeurs territoriaux sont libres d'adhérer à tout moment.

Lorsqu'une collectivité fait le choix d'adhérer à la mission de MPO et conclut une convention avec le centre de gestion, les actes concernés par la médiation préalable obligatoire doivent mentionner, dans les voies et délais de recours, l'obligation de saisir le médiateur du centre de gestion avant toute saisine du tribunal administratif, dans le délai de recours contentieux.

A défaut, le délai de recours contentieux ne court pas à l'encontre de la décision litigieuse.

Quels sont les litiges de la fonction publique territoriale concernés par la MPO ?

L'article 2 du décret n° 2022-433 du 25 mars 2022, relatif à la procédure de médiation préalable obligatoire applicable à certains litiges de la fonction publique et à certains litiges sociaux, liste les domaines de la médiation préalable obligatoire.

La médiation préalable obligatoire ne concerne pas toutes les questions relatives à la fonction publique territoriale. Le médiateur intervient uniquement dans les 7 cas de décisions administratives individuelles défavorables concernant :

  • la rémunération ;
  • les refus de détachement, de placement en disponibilité ou de congés non rémunérés ;
  • la réintégration à l'issue d'un détachement, d'un placement en disponibilité ou d'un congé parental ou relatives au réemploi d'un agent contractuel à l'issue d'un congé non rémunéré ;
  • le classement de l'agent à l'issue d'un avancement de grade ou d'un changement de cadre d'emplois obtenu par promotion interne ;
  • la formation professionnelle tout au long de la vie ;
  • les mesures appropriées prises par les employeurs publics à l'égard des travailleurs handicapés (aménagement pour assurer l'accès ou le maintien du poste aux travailleurs handicapés) ;
  • l'aménagement des conditions de travail des fonctionnaires qui ne sont plus en mesure d'exercer leurs fonctions pour des raisons médicales.

En revanche le recours à la médiation préalable ne peut être demandée pour résoudre les litiges concernant des décisions faisant intervenir un jury ou une instance paritaire (par exemple en matière de concours ou de discipline) ainsi que des décisions d'inaptitude médicale et de calcul des droits à la retraite.

La médiation préalable obligatoire s'appliquera pour les décisions individuelles prises à compter du 1er jour du mois suivant la signature de la convention d'adhésion avec le Centre de Gestion.

La procédure de la médiation préalable obligatoire

L'agent public qui conteste une décision administrative individuelle a l'obligation de saisir au préalable le médiateur dans le délai de recours contentieux de deux mois.

Si le cas échéant, le juge administratif était directement saisi, il rejettera la demande par ordonnance et la transmettra au médiateur désigné par le Centre de gestion.

L'agent doit saisir le médiateur par courrier ou courriel accompagné de la copie de la décision contestée lorsqu'elle est explicite ou de la copie de la demande ayant fait naître cette décision lorsqu'elle est implicite.

La saisine du médiateur par l'agent interrompt le délai de recours contentieux et suspend les délais de prescription jusqu'au terme de la médiation.

Un recours gracieux ou hiérarchique après l'organisation de la médiation n'interrompt pas de nouveau le délai de recours.

La médiation à l'initiative des parties et à l'initiative du juge

Au-delà de la médiation préalable obligatoire (MPO), les centres de gestion peuvent assurer d'autres formes de médiation à la demande.

L'ajout par la loi de la possibilité pour les centres de gestion d'assurer une mission de médiation à l'initiative du juge ou à l'initiative des parties est donc une chance supplémentaire de résolution amiable des conflits, hors du champ limité de la MPO.

La convention cadre conclue avec le CDG prévoit ainsi la possibilité de recourir également à ces formes de médiation.

La médiation à l'initiative des parties

Elle s'effectue en dehors de toute procédure juridictionnelle. Les parties doivent être d'accord pour entrer en médiation et s'entendre pour désigner le médiateur chargé de les aider à régler leur conflit. S'il est fait appel au Centre de gestion pour une telle médiation, une convention spécifique sera établie pour chaque affaire et sera signée par les parties en conflit.

La médiation à l'initiative des juges

Lorsqu'un tribunal est saisi d'un litige, le juge peut, après avoir obtenu l'accord des parties, ordonner une médiation pour tenter de parvenir à un accord entre elles. Le juge peut choisir de confier la médiation à un centre de gestion.

La collectivité ou l'établissement signataire de la convention avec le Centre de gestion déclare comprendre que la médiation n'est pas une action judiciaire et que le rôle du médiateur est de l'aider à parvenir à trouver une solution librement consentie avec la ou les personne(s) avec laquelle (lesquelles) elle (il) est en conflit.

Une convention de mise en œuvre d'une médiation ordonnée par le juge sera établie pour chaque affaire et sera signée par les parties en conflit.

A l'issue de la médiation, le médiateur informe le juge de ce que les parties sont ou non parvenues à un accord.

Les délais de recours contentieux sont interrompus et les prescriptions sont suspendues à compter du jour où, après la survenance d'un différend, les parties conviennent de recourir à la médiation ou, à défaut d'écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation.

Les délais de recours contentieux recommenceront intégralement à courir à l'issue de la médiation et les prescriptions recommencent également à courir mais pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois.

Quels sont les litiges concernés par la médiation à l'initiative des parties ou du juge ?

Les litiges concernés sont ceux relevant de la compétence des Centres de gestion, cela pourrait concerner par exemple les litiges ayant trait à la carrière des agents, à l'organisation du temps de travail, à la cessation de fonctions (notamment démission, rupture conventionnelle.). mais également aux champs relevant de la médiation préalable obligatoire, si la collectivité n'a pas adhéré à la prestation proposée par le Centre de Gestion (rémunération, refus de réintégration après une période disponibilité, formation.).

Les avis ou décisions des instances paritaires, médicales, de jurys ou de toute autre instance collégiale administrative obligatoirement saisie ayant vocation à adopter des avis ou des décisions sont exclus du dispositif.